13 millions de personnes sont en situation de crise alimentaire aiguë en RDC selon la FAO

La République Démocratique du Congo  vient de traverser plusieurs décennies des conflits récurrents ayant entrainé des milliers de déplacés internes

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M. Aristide Ongone Obame-Représentant de la FAO en RD Congo (1)

M. Aristide Ongone Obame-Représentant de la FAO en RD Congo 

La République Démocratique du Congo  vient de traverser plusieurs décennies des conflits récurrents ayant entrainé des milliers de déplacés internes et affectant particulièrement les  femmes et les enfants. Le 6 décembre 2018, le Groupe de travail technique (GTT) de l’IPC (composé de plusieurs ministères), en collaboration avec le Ministère de l’agriculture et le Cluster sécurité alimentaire, Pêche et Elevage vient de publier les résultats issus des analyses du Cadre Intégré de Classification de la sécurité alimentaire, IPC aiguë 16ème cycle. Notre journal a rencontré le Représentant de la FAO, Monsieur Aristide Ongone Obame pour avoir plus d’éclairage sur ces résultats.

Agence Dia: Pouvez-vous d’abord expliquer à nos lecteurs c’est quoi le Cadre Intégré de Classification de la sécurité alimentaire, IPC

Aristide Ongone Obame (AOO) : l’IPC est un forum technique qui réunit des cadres techniciens du gouvernement (plus précisément des ministères de l’Agriculture, de l’Elevage et Pêche, du Développement Rural, des Affaires Humanitaires, du Plan, de la Santé, des Transports et Voies de Communication, de l’Enseignement Supérieur et Universitaire, etc.), des Universités, de la Société Civile, des Organisations non gouvernementales et des agences du Système des Nations Unies œuvrant sur l’ensemble du territoire national dans le but de classifier la sévérité et les causes des situations d’insécurité alimentaire. Pour y arriver l’IPC recourt à quatre indicateurs majeurs, notamment, la consommation alimentaire, l’évolution des moyens d’existence, l’état nutritionnel et la mortalité. Il tient aussi et surtout compte de chocs qui ont impacté les piliers de la sécurité alimentaire (disponibilité, accès, utilisation et stabilité).

Depuis son adoption par la RDC, en 2007, nous sommes actuellement au 16ème cycle

Agence Dia : Monsieur le Représentant, quand on se réfère au cycle précédent on constate que le nombre de personnes en situation de crise alimentaire en RDC ne fait qu’augmenter. Les derniers résultats du 16ème cycle IPC viennent de le confirmer.

AOO : Effectivement, à la fin de chaque cycle de l’IPC, le Groupe de Travail Technique de cet outil qui permet de visualiser la situation assez complexe de vulnérabilité à l’insécurité alimentaire et nutritionnelle des populations, publie des résultats indicatifs au niveau national. Et cette année, en accord avec le Ministère de l’agriculture l’exercice a été respecté avec la restitution des résultats des analyses du Cadre Intégré de Classification de la sécurité alimentaire, IPC aiguë 16ème cycle.

Il faut donc retenir que 13,1 millions de personnes vivant dans des milieux ruraux sont dans un état d’insécurité alimentaire aiguë. Ce qui veut dire que ces 13,1 millions de personnes sont classées en phase de crise et d’urgence représentant successivement la phase 3 et 4 du Cadre de classification de la sécurité alimentaire (IPC). Comme le montrent les résultats la situation de la sécurité alimentaire des zones rurales s’est fortement dégradée entre juin 2017 et juin 2018. L’analyse faite montre que toutes ces personnes affectées représentent environ 23% de la population rurale des 101 territoires sur un total de 145 territoires. Ce qui est énorme pour le pays.

Agence Dia : Dans quelles zones du pays retrouve-t –on toutes ces personnes ?

AOO : Il est nécessaire de préciser, comme je viens de le déclarer ci-haut, que les analyses se sont réalisées dans 101 territoires sur un total de 145 territoires que compte le pays. Les analyses de 44 territoires n’ont pas été faites faute de données actualisées. Et la majorité des personnes vulnérables à cette insécurité alimentaire et nutritionnelle se retrouvent surtout dans les zones affectées par les conflits armés et inter-ethnique ou communautaire.

Ainsi, les personnes en situation d’urgence ou phase 4 se retrouvent dans 9 territoires. C’est plus particulièrement les territoires de Djugu dans la province de l’Ituri ; de Kalemie, Nyunzu et Manono dans la province de Tanganyika; de Mitwaba et Pweto dans le Haut-Katanga. On les retrouve aussi dans les territoires de Kamonia et Mweka dans la province du Kasaï et de Miabi dans le Kasaï-Oriental.

Les personnes en phase 3 sont éparpillées dans 31 territoires à travers le pays, y compris dans les zones dites stables.

Agence Dia : Qu’est ce qui justifie cette augmentation de personnes en situation d’urgence ?

AOO : Plusieurs facteurs sont à la base de cette détérioration globale de la sécurité alimentaire observée entre juin 2017 et juin 2018. Il s’agit principalement de la montée marquée des conflits armés dans le pays en 2017, particulièrement en Ituri et au Sud-Kivu et aussi l’extension des affrontements dans le Tanganyika et le grand Kasaï. Ces conflits ont provoqué de nouveaux déplacements des populations  et détérioré davantage l’accès à la nourriture et surtout aux zones des moyens d’existence des ménages.

Certaines zones du pays ont été infestées par la chenille légionnaire d’automne qui a attaqué la culture de maïs. Les enquêtes réalisées conjointement par le Ministère de l’Agriculture, le PAM et la FAO ont fait état de 87 territoires infestés sur 145 territoires du pays. Pour rappel, en 2018, les attaques du ravageur ont été signalées dans 129 territoires sur 145  et les pertes cumulées enregistrées sont évaluées à 300 millions d’USD en 2017 et 357 millions USD en 2018.

On a aussi enregistré la persistance et l’extension des zones touchées par les épidémies comme le choléra, la rougeole et dernièrement la maladie à Virus d’Ebola en plus de la maladie de Konzo. Ces épidémies affectent des membres actifs au sein des ménages et en corollaire l’ensemble de la communauté où près de 10% d’enfants de moins de 5 ans souffrent de la malnutrition aiguë sévère.

C’est pour toutes ces raisons et tant d’autres, que nous n’avons pas évoqué ici, que le narratif commun de la nutrition en RDC évalue à environ 6 millions d’enfants malnutris (chronique) et 7,2 millions de femmes souffrant d’anémie. Ce qui confirme une fois de plus l’ordre de grandeur estimé par l’IPC 2018. Et quand on fait une analyse comparative entre le 16ème et le 15ème cycle, on note une augmentation d’environ 70% de personnes en phase 3 et 4 de l’IPC.

Agence Dia : Monsieur Aristide Ongone Obame, ces résultats ne sont pas reluisants pour la RDC. Que compte faire la FAO pour aider le gouvernement congolais à relever le défi.

AOO : Il sied de rappeler que depuis 2008, les résultats IPC servent de narratif stratégique de la coordination du Cluster sécurité alimentaire dans le Plan de réponse humanitaire (HRP) du pays pour sauver des vies et restaurer la production agricole d’urgence. Outre le HRP et l’Aperçu de besoins humanitaires (HNO) qui sont fournis chaque année par la communauté humanitaire, le GTT IPC, donne aux décideurs du gouvernement (siégeant au Comité national d’évaluation de la vulnérabilité, NVAC), la cartographie actualisée de l’insécurité alimentaire/vulnérabilité en estimant ainsi les besoins des populations en phase 2, phase 3, et phase 4. Ces résultats servent surtout aux décideurs à faire une analyse rigoureuse de l’insécurité alimentaire dans les contextes d’urgence, de transition et de développement.

En sa qualité de chef de file du Cluster sécurité alimentaire conjointement avec le programme alimentaire mondial, la FAO œuvre à impliquer au maximum les acteurs du secteur de la sécurité alimentaire et nutrition et la communauté humanitaire pour rassembler au maximum et de manière structurée les données existantes afin de faciliter la prise des décisions mais surtout pour planifier la réponse et cibler les régions les plus vulnérables. Cette action cadre avec la mission de la FAO, celle d’atteindre la sécurité alimentaire pour tous et de veiller à ce que les êtres humains aient un accès régulier à une nourriture de bonne qualité qui leur permette de mener une vie saine et active.

Agence Dia: Votre dernier mot

AOO : la République Démocratique du Congo est un pays d’espoir. Avec toutes ses potentialités elle peut nourrir environ 2 milliards de personnes. Pour cela il nous faut de la paix pour réussir ce pari. Conformément à son mandat et vue sa détermination d’atteindre l’Objectif Faim Zéro d’ici 2030, la FAO s’engage à accompagner le Gouvernement congolais dans sa politique de développement du  secteur agricole.

Voilà pourquoi la FAO lance un appel pathétique à toutes les parties prenantes afin de sauver ces milliers de vies des congolais en danger. C’est maintenant qu’il faut agir. La FAO s’engage à soutenir le gouvernement et tous les partenaires impliqués dans la sécurité alimentaire à mettre en place une structure de mobilisation de ressources nécessaires pour atteindre ce défi. La FAO rassure aussi sa détermination de ne ménager aucun effort  afin de d’appuyer la RDC à mobiliser une assistance des besoins) en faveur des populations vulnérables se trouvant dans des zones déclarées pour l’amélioration de la productivité et de leur production alimentaire.

Junior Kitambala

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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