Après avoir passé dix ans à la Haye aux Pays-Bas, trois juges de la chambre d’appel de la Cour pénale internationale (CPI) ont décidé, le vendredi 08
Après avoir passé dix ans à la Haye aux Pays-Bas, trois juges de la chambre d’appel de la Cour pénale internationale (CPI) ont décidé, le vendredi 08 juin 2018, d’acquitter Jean Pierre Bemba, condamné en première instance à dix-huit ans de prison pour crimes contre l’humanité et crimes de guerre, commis par ses troupes, envoyées en 2002 durant cinq mois en Centrafrique, en soutien à un régime vacillant confronté à une rébellion. Il a pu quitter le centre de détention de la CPI le 12 juin 2018 pour rejoindre sa famille en Belgique.
Si tout va bien, le président du Mouvement de libération du Congo (MLC) va retrouver les siens à Kinshasa en juillet prochain où il va participer au congrès qui sera organisé par son parti, du 12 au 14 juillet 2018. Sa tristesse sera grande lorsqu’il constatera que, les cadres de son parti qui étaient avec lui à la création et avec qui, il a cheminé ensemble jusqu’à son emprisonnement en 2007 n’y sont plus. Il a appris leur départ et il a pris acte, mais il n’a pas vu comment cela était passé.
Un parti ayant pignon sur rue
A la naissance de la 3ème République, le Mouvement de Libération de Congo a été connu des congolais comme un parti politique ayant pignon sur rue. Sa force politique lui a valu la notoriété d’un parti de l’opposition parmi ceux qui existaient avant, notamment Palu, UDPS, Fonus, PDC, MPR fait-privé, pour ne citer que ceux-là.
Bien que le président du parti, Jean Pierre Bemba, aurait échoué face à Joseph Kabila au second tour à la présidentielle de 2006, le MLC a élu, lors de cette première législature, de députés nationaux et provinciaux à travers les 11 provinces du pays. Pendant que le sénateur Jean Pierre Bemba se trouvait à la CPI, le MLC a réussi à élire quelques députés nationaux aux élections de 2011 qui constitue le second et dernier mandat de Joseph Kabila à la tête de la RDC, selon la Constitution. Ceux qui sont restés fidèles au parti siègent à l’hémicycle au nom du MLC, d’autres ayant quitté, y siègent en qualité des indépendants.
Bemba, un entorse pour Kabila
Installé solidement en RDC avec un bon nombre d’éléments de valeur qui se sont imposés dans le rang des têtes bien connues dans l’histoire de la nouvelle classe politique congolaise, le MLC est devenu l’un des partis emblématiques de l’opposition. Sur le plan politique, lorsqu’on cite des noms en vedette, ceux du MLC ne peut pas manquer. Starifié comme on ne peut pas le croire, le Mouvement de libération du Congo est, à cet effet, devenu l’objet d’une cueillette. Une pépinière dans laquelle la Majorité présidentielle n’a cessé de cibler pour éliminer l’entorse de Bemba à Kabila. Considéré comme un étang où il pouvait facilement pêcher les gros poissons pour calmer sa faim, le pouvoir de Kinshasa a mis en place, une stratégie capable de détruire la portée de la force de Jean Pierre Bemba.
Il a commencé par le débauchage, l’un après l’autre, de têtes pensantes et bien connues qui faisaient la fierté du MLC. Olivier Kamitatu, François Mwamba, Thomas Luhaka, Jean-Lucien Busa, José Makila, Adam Bombole, Michel Bongongo, Germain Kambinga, etc , ont fini par être nommés à la tête de différentes institutions de la République par le président Joseph Kabila. Presque tout le monde issu de ce débauchage, a crée un parti politique, agrée sans condition, pour alimenter la Majorité présidentielle.
Beaucoup d’entre eux ont perdu leur notoriété auprès de la population qui les a votés sous la casquette du MLC. Ces derniers pourront certainement avoir de difficultés de renouveler leur confiance auprès du peuple. Seul le scrutin le tranchera.
Vidés de leurs substances populaires
Ceux-là qui ont choisi de traverser la rue pour servir le maître dont le pouvoir à la tête du pays est arrivé à la fin depuis décembre 2016, sont-ils classés dans le rang de la Majorité au pouvoir en cette période électorale ? Ces derniers n’auront plus le courage de tendre la main à l’opposition et aussi, les difficultés d’agir en indépendants pèseront sur eux à cause du seuil imposé par la nouvelle loi électorale qui exige 1% pour le député national et 3% pour le provincial. C’est pourquoi, ils sont tous contraints de s’aligner parmi les plateformes créés au sein de la Majorité.
Malgré ce départ en cascade de ces pions majeurs, l’équipe dirigée par la dame de fer Eve Bazaiba qui s’est organisée pour tenir le coup, a donné de l’espoir aux membres du parti. Aujourd’hui, le MLC maintient le cap et prend la résistance devant la tempête qui continue à souffler sur la RDC en cette période où chaque acteur politique cherche à se positionner, loin de l’idéologie de son parti ou de son organisation. Le panier contenant de l’appât succulent de la Majorité présidentielle continue à circuler et on craint que d’autres gros poissons s’y jettent.
La Secrétaire générale du MLC a résisté à l’hameçon préparé et aujourd’hui, à l’acquittement de « Chairman », elle est sortie tête haute de toutes les attaques dirigées contre elle. Eve Bazaiba Masudi doit se prétendre être la meilleure et l’unique femme du moment à faire l’honneur de la RDC. Elle a atteint un niveau qui peut la classer parmi les excellentes politiciennes d’Afrique car à l’heure actuelle, elle marque l’histoire politique de notre pays.
Les fretins peuvent aussi remplir la marmite dans une bonne sauce
La présence à Kinshasa de Jean Pierre Bemba va changer plusieurs données tant au sein de son parti le MLC et de l’opposition que de la Majorité au pouvoir. L’équipe Bazaiba n’est aussi moindre que les partants, elle a des attaquants de pointe tels que Jacques Ndjoli, Fidèle Babala, Raymond Ramazani Baya, Jacques Lungwana, N’Dom nda Ombel, Ndolela, Nkoy Mafuta, le sénateur Polycarpe Mongulu, aujourd’hui juge à la Cour constitutionnelle, Me Alexis Lenga, valentin Gerengbo et tant d’autres. Ces derniers sont capables de mettre la barre très haute et maintenir le leadership du MLC parmi les partis avant-garde en RDC.
Parmi les trois Secrétaires généraux que le MLC est connu : François Mwamba Tshishimbi du décembre 2005 en avril 2011 ; Thomas Luhaka Losendjola d’avril 2011 à décembre 2014 et Eve Bazaiba Masudi de décembre 2014 à aujourd’hui, le parti de JP Bemba Gombo n’a pas aussi de courbes inquiétantes. Mais la période de Bazaiba reste extraordinaire, le parti est géré, contre vents et marées, par une dame de fer qui a subi de coups venus de partout, alors que le MLC était déjà vidé de grosses calibres.
A qui le peuple veut remettre le pouvoir ?
Le peuple congolais soutient la démocratie, un régime politique dans lequel le pouvoir émane du peuple et appartient au peuple dans son ensemble. Il veut les libertés publiques, dont l’ensemble des droits et de prérogatives des individus définis et garantis constitutionnellement.
« Aucun congolais ne veut plus le totalitarisme, un régime politique autoritaire et illégal, établi et maintenu grâce à la violence. Mais les congolais veulent la notion totalitarisme qui implique aussi une volonté de transformation profonde de la société et l’avènement d’un homme nouveau », s’est exprimé l’un des représentants de la jeunesse du MLC.
Quand à l’organisation des élections, un cadre du parti cher à Jean Pierre Bemba analyse la situation de cette manière : « Le peuple a déjà compris que cette manière d’organiser les élections est une façon de nous conduire, au sens même de forme d’organisation politique, à l’oligarchie où le pouvoir est conçu comme la propriété privée du groupe qui l’exerce et qui ne souhaite s’en dessaisir à aucun prix. Vaut mieux un homme nouveau que des beaux projets irréalisables depuis ».
Gel Boumbe
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