Homélie de S.E. Mgr Fridolin Ambongo au culte œcuménique en faveur de la paix en RDC du samedi 29 décembre 2018

La Conférence Episcopale nationale du Congo (CENCO) et l’Eglise du Christ au Congo (ECC) ont organisé un culte œcuménique en faveur de la paix en RD

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Mgr Ambongo saluant le couple Martin Fayulu

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La Conférence Episcopale nationale du Congo (CENCO) et l’Eglise du Christ au Congo (ECC) ont organisé un culte œcuménique en faveur de la paix en RDC à 24 heures de la tenue des élections générales du 30 décembre en RDC en la Cathédrale Notre-Dame du Congo de Kinshasa.

C’était en présence des parties prenantes de ce processus électoral dont des candidats à la présidentielle ou leurs représentants, des ambassadeurs accrédités à Kinshasa et de plus de dizaine de chrétiens.

Ci-dessous, l’intégralité de l’homélie de S.E. Mgr Fridolin Ambongo, Archevêque de Kinshasa et vice-Président de la CENCO:

« Si, en ce jour, tu avais connu, toi aussi, ce qui était pour ta paix! Mais maintenant cela demeure caché à tes yeux. (Luc 19,42) ».

Chers Frères et Sœurs dans le Seigneur,

A la veille de la tenue des élections dont la campagne a été émaillée d’incidents. A l’aboutissement du processus électoral qui a connu le haut et le bas. A quelques heures du scrutin tant attendu, des inquiétudes planent encore sur nos têtes et la peur coule dans nos cœurs.

C’est dans ce contexte que l’évangile que nous venons d’entendre : « Nous sommes l’image de Jésus qui pleure de tristesse ». Jésus qui pleure sur le sort de la ville de Jérusalem. En entrant dans la ville Jérusalem, Jésus  pleure sur cette ville. Et Jésus est un Dieu et quand un Dieu pleure, ce que c’est sérieux.

Il pleure sur le sort réservé au peuple habitant cette ville de Jérusalem. Il s’agit, d’une part, des pleurs de lamentation et, d’autre part, des pleurs de compassion face à un peuple trompé et il n’a pas compris le vrai chemin de la vie. Un peuple souvent exploité et éloigné du salut, éloigné du bonheur à cause de ses dirigeants. Telle était la situation en Israël.

Jésus est venu apporter le salut au monde mais son peuple à travers ses dirigeants refuse de le reconnaitre. Il refuse donc le sauveur, il refuse le salut pour le peuple. Jérusalem en se dirigeant se coupe de Dieu, il refuse d’écouter le message de paix apporté par Jésus.

En effet, mes frères et sœurs quand on vit dans le refus de vrai Dieu, on navigue à vide, sans boussole et ont fini par détruire toute une communauté dans l’erreur. Tel est souvent le sort de celui qui s’enferme dans l’orgueil et l’égoïsme, il ne veut écouter personne ni même la voix de Dieu qui parle dans le plus profond de son cœur.

Le seigneur Jésus, c’est la manne sur Jérusalem et prédit sa chute, sa destruction. Justement comme la conséquence de son refus du salut, de son refus de la paix et de la vie offert par Dieu lui-même.

Dans un message de la CENCO du 22 novembre 2018, nous en tant que pasteurs congolais avons rappelés que dans « le contexte actuel, les élections inclusives, libres, crédibles et transparentes constituent la voie de la paix dans notre pays ». Si nous comprenons d’où nous viendra la paix, alors prenons avec responsabilité le rendez-vous de notre histoire.

Cultivons donc la vertu de la tolérance face à la diversité des projets de société des différents candidats. La divergence d’idées n’est pas une raison pour mettre le feu au pays. Puisque nous voulons la paix, privilégions l’intérêt supérieur de la Nation et bannissons l’incitation à la violence. Si nous voulons la paix, posons aussi des gestes qui ne poussent pas les autres au désespoir  et la résignation.

Mais hélas, certains de nos compatriotes donnent l’impression de vouloir tenir la République Démocratique du Congo en otage sous les joutes de la provocation, de la violence, de l’insécurité, de pillage des ressources naturelles et même aujourd’hui comme ça ne suffisait pas, il y a des épidémies. Cela ne peut jamais profité au peuple congolais sinon à certains de nos compatriotes sans scrupules, dépourvus de sens de la dignité humaine, semeurs de la désolation.

Les pleurs de Jésus sont aussi des pleurs de compassion pour tous les pauvres d’Israël qui étaient contre les brebis sans berger (Mc 6,30-34). C’étaient ces estropiés, ces malades qui constituaient des foules qui suivaient Jésus et qui étaient empêchés de l’approcher et de suivre son message par les scribes et les pharisiens, les dirigeants du peuple.

Face à la souffrance entretenue de nos frères et sœurs, nous faisons nôtre la compassion de notre Seigneur Jésus-Christ. Nous pensons particulièrement à nos compatriotes de Butembo et Béni au Nord-Kivu et de Yumbi dans le Mai-Ndombe. C’est depuis plusieurs années que nous assistons à des massacres vraisemblablement planifiés  dans la zone de Béni. Massacres récurrents qui depuis 2013 ont fait plus de 2000 morts. Comme si cela ne suffisait pas aux souffrances voulues et imposées à ces peuples, s’est ajoutée la maladie à virus Ebola. Devenue du coup un outil pour priver cette portion importante du peuple congolais de son droit fondamental de participer aux élections. C’est un véritable délit de la justice.

Et c’est avec raison que nos frères et sœurs de Butembo et Béni se disent trahir et abandonnés par son propre triste sort. Ce sont  tous leurs efforts fournis pour se préparer aux échéances électorales qui se voient ainsi anéantis. On peut facilement comprendre la frustration et la colère de ce peuple.

En même temps, je voudrais ici au nom du Seigneur exhorté mes frères et sœurs de Béni et de Butembo à ne pas céder à la provocation ni succomber à la tentation du désespoir qui porterait à baisser la garde contre cette maladie à virus Ebla. Ne nous trompons pas de cible, le virus Ebola est une réalité, il est bien là, toujours menaçant. S’en prendre au travail abattit par les équipes de riposte contre Ebola, serait non seulement dangereux, improductif mais surtout mettre la santé publique en péril.

Du bas fond de notre misère, continuons à garder allumé la flamme de l’espérance que nous apporte Emmanuel, Dieu parmi les hommes. Nous sommes aussi sidérés par des pleurs de nos frères et sœurs du territoire de Yumbi où des dizaines de personnes ont été massacrés dans un conflit ethnique sans être assistés par les forces de l’ordre qui ne sont venus que très tard pour constater le dégât.

Face à toutes ces situations, en tant que chrétiens, chrétiennes et croyants nous ne pouvons tomber dans la résignation. Nous devons rester débout dans l’espérance d’un lendemain meilleur. En ce temps de Noël, il nous faut accueillir de façon particulière la présence du fils de Dieu, prince de la paix au milieu de nous. Son amour envers les nécessiteux, les pauvres et les oubliés, est si grand qu’il se fait petit. Il s’est rabaissé non seulement par la naissance dans la pauvreté mais aussi par sa mort sur la croix afin de nous libérer de l’esclavage du pêché, de l’égoïsme, de l’orgueil et de la méchanceté.

Voilà pourquoi, chers frères et sœurs!

Nous exhortons à faire des élections de demain un moment de rencontre, un moment de construction pour un avenir nouveau à notre pays, à notre peuple. La journée de demain ne doit pas être l’aboutissement des confrontations entre les ennemis mais plutôt un moment de convivialité entre les frères et sœurs qui rêvent d’un avenir plus beau qu’avant pour notre pays. Nous ne devons en aucun cas permettre que les élections soient une occasion de plus pour détruire la République Démocratique du Congo et pour verser le sang des congolais qui n’a que trop coulé de plus des décennies.

Prions avec foi et persévérance pour que le Seigneur fasse de nous des artisans de paix et de bâtisseurs d’amour pour sa gloire et le salut de notre pays.

Amen.

Fait à Kinshasa, le 29 décembre 2018

+ Fridolin AMBONGO Besungu, ofm

 Cap

Archevêque Métropolitain de Kinshasa

 

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