Loi électorale révisée: L’article 13 favorable aux candidates issues de partis politiques, quid des candidates indépendantes ?

Loi électorale révisée: L’article 13 favorable aux candidates issues de partis politiques, quid des candidates indépendantes ?

En RDC comme dans la plupart des pays, la participation politique des femmes est faible par rapport à celle des hommes. Cette tendance se répercute su

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En RDC comme dans la plupart des pays, la participation politique des femmes est faible par rapport à celle des hommes. Cette tendance se répercute sur le taux d’occupation des postes de prise de décisions à tous les niveaux par des femmes

Selon la Commission episcopale justice et paix, CEJP, dans le document “évaluation de la participation politique de la femme congolaise aux élections de 2018-2019”, sur 15 355 dossiers de candidatures à la députation nationale reçues par la Commission électorale nationale independente, CENI, il n’y a eu que 1 795 soit 11,7% qui concernaient les femmes. Parmi elles, seulement 49 femmes ont été élues, soit 11%.

A l’approche des élections de 2023, après plusieurs plaidoyers des organisations internationales et de la société civile qui militent pour les droits des femmes et leur représentativité politique, les deux chambres du parlement ont révisé l’article 13 de la loi électorale. Une loi qui vient d’être promulguée par le Chef de l’Etat et publiée dans le journal officiel.

L’article 13 de la loi électorale récemment révisée apporte une innovation importante. A son alinéa 3, il stipule que “la liste qui aligne 50% au minimum de femmes dans une circonscription électorale, est exemptée au paiement de cautionnement”.

Cette loi va plus aider les femmes qui évoluent dans les partis politiques, car beaucoup sont celles qui ne bénéficient pas de l’appui ou du soutien de leurs partis ou regroupements politiques lors des élections comme ça été le cas de Sophie, candidate aux élections législatives de 2018, dans la circonscription de Mont Amba.

“J’ai eu des difficultés car les hommes dans notre parti politique ne voulaient pas que j’entre dans la course électorale avec eux. Celui avec qui nous comptions dans la même circonscription électorale ne faisait pas le poids d’où à ses yeux, j’étais une concurrente”, explique Sophie et d’ajouter qu’Il y a eu même un conflit au sein du parti à cause de cela. “Les hommes peuvent être parfois égoïstes, certains pensent que la femme est inférieure et ne devrait pas être égale à l’homme meme lorsqu’il s’agit de faire preuve des competences”.

Pour Sophie, cette loi révisée apporte une lueur d’espoir pour nous qui évoluons dans les partis politiques surtout que les cadres des partis et regroupements politiques n’auront plus d’excuses.

Chantal, candidate députée provinciale membre d’un parti de l’opposition pour la commune de Ngaliema en 2018, raconte quant à elle que les pesanteurs socioculturelles sont présentes même au niveau de partis politiques. Pour certains hommes de son parti, les femmes sont bonnes pour la mobilisation, l’accueil, etc.

“Ils ne voulaient pas que je postule mais j’ai beaucoup insisté avant d’être finalement aligné sur la liste du parti. N’ayant pas beaucoup de ressources et un appui financier du parti ça n’a pas été facile pour moi de mener à bon ma campagne. J’ai échoué”, explique-t-elle.

Une timide avancée

Mentionnant, la loi révisée, Chantal loue l’alinéa 3 de l’article 13 mais pense que l’alignement à 50% de femmes sur les listes des partis et regroupements politiques devrait être obligatoire pas juste une mesure incitative comme prescrit dans la loi. Pour elle, beaucoup de femmes possèdent des compétences nécessaires pour réussir dans la carrière politique et y laisser leurs empreintes.

Candidate indépendante aux élections législatives de 2018 dans le Kwilu, Hélène Ndola n’a pas réussi à obtenir un siège. Selon elle, la cause de son échec est liée à l’instauration du seuil électoral. Remplir le seuil de représentativité était une condition pour qu’une liste des candidats puisse participer à la distribution des sièges dans une circonscription et étant indépendantes, il était difficile à Hélène de remplir cette condition.

Selon Hélène dans la loi électorale révisée, l’article 13 est plus ou moins favorable aux candidates membres des partis politiques, même s’ils devraient rendre cela contraignant.

“Je trouve aussi que les législateurs n’ont pas tenu compte de femmes candidates indépendantes. Ils auraient pu supprimer carrément le cautionnement pour les femmes”, estime Hélène.

Parlant des chances, Ndola croit que visiblement les femmes évoluant dans les partis politiques ont plus de chance d’obtenir de siège contrairement aux indépendantes. “Rien n’est jamais joué d’avance, les candidates indépendantes doivent très bien se préparer avant de se lancer dans la course”, fait-elle-observer.

Tout comme Hélène, Me Marcel Kasongo estime que cette loi est plus favorable aux femmes qui sont dans les partis politiques et non des candidates indépendantes.  Il pense que les législateurs devraient alléger si pas éliminer le paiement de la caution pour les candidatures féminines en général afin de leur permettre une participation massive aux élections. “Il faut savoir que toutes les candidates ne viennent pas forcément des partis ou regroupements politiques, d’où il fallait considérer aussi les indépendantes”, mentionne Me Kasongo.

Pour Mme Annie Matundu Mbambi, Consultante en Genre et développement, une activiste et une militante sur la question des droits des femmes, elle croit que cette innovation est une avancée très significative et aura un impact positif si les partis et regroupements politiques suivent la loi. « On aura certainement beaucoup de femmes dans la compétition », affirme-t-elle.

Par contre Mme Annie Matundu éprouve aussi une crainte. “Je crains que les partis ou regroupements politiques fassent le choix de payer leurs cautions au lieu d’aligner les femmes, comme cela a été le cas, il y a quelques années en France où les partis devraient payer des amendes au cas où ils n’aligneraient pas les femmes dans leurs listes. Ces partis ont préféré payer les amendes ».

Pour cette championne du genre, les politiciens congolais devraient s’inspirer des pays nordiques où les femmes occupent des postes de responsabilité. “Ces pays se sont développés et il y a moins de chômage », affirme-t-elle.

“On ne devrait pas mettre à l’écart plus de la moitié de la population, d’où il faudrait compter avec les femmes”, insiste Annie.

Pour sa part, Bellarmin Byamungu, haut cadre dans le parti politique Alliance des forces démocratiques du Congo AFDC soutient que les femmes ont encore là une occasion, mieux une opportunité d’exprimer leurs ambitions en œuvrant dans les formations politiques. “Une chose est vraie, peu de femmes s’engagent activement dans les partis politiques au regard du caractère des statuts des partis et surtout ceux africains qui sont comme des boutiques privées de leurs instigateurs. Les femmes ont souvent peu de chance de prospérer sans pour autant subir le harcèlement dans tous les sens”, reconnaît-t-il et d’ajouter qu’ “Il n’en demeure pas moins vrai qu’il y en a quelques unes qui ont réussi dans cet exercice.”

Bellarmin croit que cette disposition de la loi va permettre qu’un nombre important de femmes soit aligné pour profiter de cet avantage capital de ne pas payer la caution qui de fois empêche l’alignement de plusieurs candidats qu’ils soient hommes ou femmes.

“Il est très difficile pour les candidat-es indépendant-es de gagner au regard de la loi qui préconise le seuil. Une candidate indépendante aura moins de chance de réaliser les suffrages suffisants qui lui permettra de gagner haut la main. Cependant, une liste bien constituée a plus de chance de l’emporter car les voix s’additionnent en faveur des personnes sur ladite liste”, se réjouit-t-il.

Incitative mais pas contraignante

La nouvelle loi électorale intègre l’aspect équilibre genre voulu par la constitution en son article 14 bien que, sans mesure contraignante.

Pour Me Marcel Kasongo, avocat, analyste et défenseur des droits des femmes, cette innovation est encourageante parce que la participation politique de la femme permettra le rétablissement de la paix et l’amélioration des conditions sociales de la population. Les droits de la femme pourront être respectés. Et pour ça, il faut que les femmes soient autonomes financièrement et nombreuses aux postes décisionnels dans les partis politiques.

Pour sa part Mme Fifie Baka, porte parole de l’asbl Rien sans les femmes RSLF, dit qu’il est vrai que la demande était entre l’intégration des mesures de contraintes assorties des sanctions pour l’alignement paritaire des hommes et femmes sur les listes électorales mais cela n’a pas été retenus.

La porte-parole de RSLF estime toutefois que la nouvelle loi électorale est une timide avancée à saluer. “C’est une mesure incitative pour encourager les partis politiques à aligner plus de femmes sur les listes électorales. C’est maintenant aux femmes de montrer leurs ambitions au sein de leurs partis politiques”, mentionne-t-elle.

Parlant du sort des candidates indépendantes, Fifie Baka pense que leurs chances sont moindre dans la course électorale car, le contexte est plus défini pour les partis politiques (seuil de représentativité….)

“Les candidates indépendantes doivent fournir plus d’efforts, être très populaire pour obtenir au moins la moitié de l’électorat des circonscriptions, ce qui n’est pas une mince à faire pour elles”, s’inquiète-t-elle.

 

Pétronelle Lusamba, JDH (Correspondance particulière)

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