Artiste congolais engagé, il est l’un des musiciens "intello". En obtenant le titre de licencié en philosophie, Jean Goubald tenait à relever un défi
Artiste congolais engagé, il est l’un des musiciens « intello ». En obtenant le titre de licencié en philosophie, Jean Goubald tenait à relever un défi personnel. Déterminé à éveiller les consciences sur la question de la protection et du respect de l’environnement, cet artiste engagé a prouvé au public qu’on peut aussi trouver des têtes bien faites dans la sphère de la musique en RDC. Il fallait oser !
« Ethique environnementale responsable : Esquisse d’une réflexion à la lumière de Hans Jonas», tel est le sujet de mémoire en philosophie défendu avec brio par l’artiste musicien Jean Goubald Kalala Midibu, le mercredi 4 juillet 2018 à l’université saint Augustin dans la commune de Limete.
Le travail présenté par Jean Goubald a été reçu et les membres de jury ont félicité le récipiendaire du jour d’avoir produit un travail de qualité en dépit de son métier d’artiste ainsi que d’autres responsabilités.
Déterminé, courageux, Jean Goubal Kalala, devait affronter son jury, essentiellement constitué de professeurs qu’il respecte et dont il révère le savoir. Un habitué des questions des journalistes sur son métier, cette fois-ci Jean Goubald devait répondre aux questions en rapport avec son travail scientifique, avec beaucoup plus d’éclaircissements pour les jurés et pour le public.
Bien agir aujourd’hui pour des lendemains meilleurs
A travers son travail, le récipiendaire a analysé et poussé plus loin sa réflexion sur l’ouvrage du philosophe allemand et historien du gnosticisme, Hans Jonas, sur le principe de responsabilité. Jean Goubald Kalala a constaté qu’aujourd’hui la question de l’environnement concerne tout le monde. Car, sa mauvaise gestion est à la base du réchauffement climatique qui, à son tour, a pour conséquences des inondations, le tsunami, etc. Son constat est parti de la pollution dans la ville de Kinshasa, de l’insalubrité hideuse qui la caractérise. D’où, l’impérieuse nécessité de sensibiliser la population sur ce sujet si important.
Le récipiendaire explique qu’il faut d’un coté faire attention aux actes que l’on pose dans le présent vis-à-vis de la nature et de l’autre , prendre en compte la possibilité d’une vie dans l’avenir. A l’en croire, « tout acte posé aujourd’hui a des conséquences sur l’avenir pour des générations futures ». Il a évoqué, à cet effet, l’exemple de la bombe atomique larguée au Japon en 1945, lors de la seconde guerre mondiale et dont les conséquences sont alarmantes jusqu’à ce jour.
Aussi, Jean Goubald Kalala a-t-il parlé, dans sa réflexion, des rapports entre le Nord et le Sud. Il a souligné que l’Occident considère l’Afrique comme une poubelle où il jette tout ce qui n’est plus d’usage chez lui. Il a épinglé notamment les cas des véhicules de seconde main dits « occasion d’Europe », des appareils électroménagers communément appelés « bilokos », des médicaments périmés, etc.
Fervent admirateur du philosophe français François Rabelais, Jean Goubald a fait d’une de ses citations, tirée de Pantagruel, son œuvre majeure, sa règle d’or qu’il reproduit dans son Epigraphe: « Science sans conscience n’est que ruine de l’âme« . Cet aphorisme résume avec éloquence l’esprit même de cet artiste de la musique congolaise moderne. Ce sur quoi a embrayé le professeur Jean Onaotsho qui a reconnu en l’artiste le souci de joindre la conscience à la responsabilité qui pousse à poser des actes responsables en tenant compte du futur.
De la responsabilité de l’Afrique
Dans son analyse, Jean Goubald estime qu’il est de la responsabilité des africains de se prendre en charge. Et là, il parle de la passivité des africains face au manque de considération des européens. Il a relevé l’indifférence ou la négligence des hommes politiques congolais face à la pollution de l’environnement. « Ils participent d’une certaine manière à l’assassinat des citoyens et au développement des maladies telles que le cholera, etc. », a-t-il lancé. Jean Goubald est arrivé à la conclusion selon laquelle les africains devraient user de leurs cerveaux, des intelligences pour rejoindre les autres intelligences. « Les Elites doivent prendre le devant. Les pays africains devraient être dirigés par des cerveaux et non par des revolvers dressés vers les populations », explique Jean Goubald.
Un a capella pour le jury
L’un des moments forts de cette soutenance est celui où un juré a demandé à l’artiste de chanter un morceau de musique composée dans le cadre d’une sensibilisation pour le respect de l’environnement… et l’artiste malgré sa voix grippée n’a pas hésité d’exécuter en a capella une des chansons de son prochain album.
Au terme de la soutenance, le récipiendaire du jour a reçu les félicitations et encouragements des membres de son jury. Le professeur Jean Onaotsho, un des jurés, a loué le courage et la ténacité dont a fait preuve l’artiste avant de lui suggérer l’appropriation de son travail pour en faire large écho dans sa musique. Professeurs, étudiants et amis ont répondu présents à ce moment historique pour cet artiste et défenseur de la nature.
C’est donc une étape franchie, et l’artiste est entré par la grande porte de la science. Jean Goubald estime qu’il faut continuer à nourrir l’âme. Il ne s’arrêtera pas là. ‘‘Je vais continuer à lire et quand je me sentirai prêt, je me lancerai alors pour le 3ème cycle’’, a-t-il confié.
Pétronelle Lusamba
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